Du Tanuki au lettré, Junipérus
Le tanuki c'est faire du faux ; bien fait c'est même l'art de faire du faux...
Pour les Japonais, le tanuki n'est en rien un bonsaï. Quand j'ai recommencé le bonsaï, j'avais sous les yeux un magazine, France Bonsaï pour ne pas le citer, où un grand Monsieur du Bonsaï Français nous montrait comment faire.
Sans jolie pièce dans ma collection nouvellement recommencée, l'idée m'a séduit et m'a aussi permis de comprendre un peu les junips.
L'important dans le Tanuki est le bois mort, un joli bois mort assez expressif, l'incrustation avec un conifère est secondaire. Sous entendue, on trouve partout un jeune plant de conifère qui tige, ce qui n'est pas toujours le cas du joli bois mort.
Après avoir trouvé au fond du terrain de la maison que j'avais en garde à l'époque (6 hectares de terrain...), puis nettoyé correctement, puis bain d'eau de javel, attente de quelques mois, puis badigeon de souffre, puis trouver un plant d'un conifère... A l'époque, je travaillais dans une prison qui avait une pépinière (pour préparer une réinsertion) , nous n'avions que des plants de thuya, du 'Leylandii' et qu'un pauvre plant d'un conifère au feuillage bleu issu d'une bouture, je ne suis pas sûr du cultivar, c'est un chinensis bleu.
Je me suis dis tant qu'à faire n'importe quoi, autant le faire en beauté ... (les feuillages bleutés et panachés ne sont pas bien vu en bonsaï...)
Mon idée avec cette "chose" était d'apprendre à cultiver ce genre. Apprendre à cultiver les junips.
Sans vraiment choisir de face, je l'ai regardé pousser, le formant de temps à autre, le ligaturant ou pas... Bref, le souffre douleur... photo de 2007 soit 5 ans après l'incrustation.
Après douze ans dans les différents pots, il "trônait" toujours au milieu de mes autres projets moches commencés en même temps...
Alors, bien sur on s'y attache, pas envie de prendre de décisions... Au hasard d'une visite d'un copain Bonsaïka, je comprends qu'il est temps de travailler cette "pieuvre".
J'ai bien une idée en tête, mais se confronter, parler, avoir d'autre idées c'est bien aussi, même pour un tanuki.
Durant la réunion du club (Bordeaux à l'époque), les vannes fusent :
-"Il est à qui le piquet, là ?
-"Enfin du bois de chauffage !"
- Etc, etc...
Certains n'avaient même pas vu la supercherie , et j'en profite pour demander aux gars qui ont une meilleure vue de l'arbre que moi... Fraisier, Fabrice et Seb.
Tous les trois me donnent une version à la fois proche et très différente de la mienne, mais toutes sont intéressantes !
L'idée de base, commune à tous, c'est de faire un arbre déséquilibré, la partie morte comme exposée aux intempéries, le reste de l'autre côté...
Lors d'une semaine de vacances et comme les choses que j'avais prévues ne sont pas possibles, rapport au temps, il faut bien que je bosse un peu... Après deux jours dans la pépi où j'ai l'impression d'avoir fais le Vietnam, je fais plus de bêtises que de bonnes choses... La décision est prise : Je bosse mon piquet ! Et à l'abri !
Ensuite, regarder ce que je dois garder ou pas. Tout en gardant en tête ce que nous avons dit, je me rabats sur le "faire avec ce que j'ai" et non ce que "je pourrais avoir"...
Donc l'idée de base est d'avoir une tête légère à droite puis le reste qui se décale à droite, jusqu'à faire un style quasi pleureur, presque cascade... Bon, en fait je m'éloigne de l'idée de Fabrice... Mais toujours dans l'idée de Fraisier, Séb et moi même...
Les premières branches tombent ...
Je suis encore loin d'avoir fini, mais au moins il est plus léger
Alors,deux ans aprés cette mise en forme... Ben, mon liquide à Jin est parti chez un collègue Bonsaïka du Maroc donc toujours pas remis de liquide sur le bois...
Peu de taille, enfin si de la taille mais sur chaque "boule" j'ai laissé un tire sève que j'ai laissé pousser librement.
Au lieu de faire un pot un peu étrange en ciment comme je l'avais pensé au début, j'ai trouvé un pot d'occase qui lui convient pas si mal que ça.
Son substrat était quand même pas top et malgré l'utilisation d'un peu de pumice, on est quand même loin d'un drainant... Là c'est 100 % zéolithe en 2-5...
Printemps 2016, un petit rempotage vite fait, j'ai un peu loupé l'implantation dans le pot, comme vous pouvez peut être le voir... Pour tout écrire, j'ai tenté un truc que je voulais essayer depuis longtemps afin d'éviter de saloper le nébari (passer un bout de bambou dans la motte puis attacher nos fils sur le bambou) mais ça m'a fait tourner la motte... Mais j'lai vu trop tard .
Une grosse racine que je ne voulais pas supprimer a été ligaturé.
Restera à poser un peu de fil, histoire d'ouvrir un peu les plateaux-nuages...
Mars 2018.
C'est triste d'avoir un "blog" et de ne pas le relire, car honnêtement, j'aurais pu le rempoter correctement.
Donc, à défaut de le rempoter correctement, je l'ai sorti et remis avec une inclinaison plus normale, donc penché fort vers l'observateur.
Pour cela, une grosse cale de zéolithe à l'arrière et un peu de rabotage sur le dessous du devant.
Accessoirement, les bambous dans la motte attachés par les trous de drainage = Très bonne fixation !
Après ce "transpotage" rapide :
Je me rends compte qu'il a bien trop poussé en tête et que dans quelques semaines, je rectifierais la partie en haut à gauche.
Début mars 2019, la tête, déjà trop lourde continue à s'étoffer, dont revenir en arrière, encore et toujours... Il faudrait que je m'attaque à ligaturer les branchouilles des branches de droites.
Ah, ben ça alors, c'est que je ferais un avril 2020... Enfin en plus de réduire la tête...
Octobre 2020. Si vous avez suivi, ce tanuki est un moyen d'apprendre. En ce mois d'Octobre, je voulais me perfectionner sur la ligature fine.
Je dois avouer que travailler du feuillu ne me permet pas de poser des fils très fins, en tout cas, loin d'une ligature pointilleuse qu'on pourrait attendre d'un shohin de junip... Là, ce n'est pas un shohin, on est d'accord, mais pour se faire la main, c'est un bon candidat (?).
Donc, c'est ça l'idée en l'amenant au club, travailler en finesse. Et puis la suite est bien diffèrente. Je dois avouer qu'avoir 3 personnes d'Ecoles différentes qui tombent d'accord sur une éventuelle mise en forme, ça fait réfléchir. Oui, la tête est trop lourde, elle rend l'arbre un peu trop statique. Et finalement, c'est tellement évident, que je m'exécute.
Finalement, très peu de ligatures fines, que de la très grosse sélection. A voir comment il réagiera.
Et bien, juillet 2021, il a bien réagit et je peux remettre les mains dedans. Enfin quand j'écris les mains, je pense plus aux ciseaux.
Je retire aussi pas mal de ligatures (cuivre ou aluminium) qui ont commencé à bien trop marquer.
J'ai également beaucoup allégé, pour faire apparaître un début de quelque chose. Malgré ça, la tête reste un peu "en pagaille".
Printemps 2022, je participe à une fête des plantes dans un village d'à côté. L'idé c'est de ramener cet arbre. En général, il attire l'oeil, déjà parce qu'il est haut, que son bois mort est imposant, bref, c'est une accroche. Donc l'idée était de le nettoyer. Et puis, je me rends compte que le bois mort au ras du substrat est entrain de pourrir. Donc, mon idée de l'emmener "loin" en version tanuki est, à l'image de la base du bois mort, partir en lambeau.
Le voici avant :
Et après une vrai grosse sélection, qui me permettra de remplir un petit seau...
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Franchement, il n'y aura pas grand chose à faire pour l'emmener vers un "bungi gi", un arbre dans l'esprit d'un lettré... Ah, oui, j'aurais dû le rempoter cette année, je verrais l'an prochain.
2023, v'la le printemps et le rempotage qui approche. Avant de commencer le rempotage, un coup d'oeil sur la base du bois mort. Il a pourrit et la partie basse est inexistante. Les vis semblent tenir mais c'est le bois qui lâche ça et là. Donc, la décision est prise, je tire dessus.... Et ça vient facilement.
2023, c'est donc la fin de ce tanuki. Il en reste un arbre qui pourrait facilement être classé dans les lettrés ou assimilés.
Le rempotage est fait, assez facilement. Le nébari n'est pas moche pour un junip. Rempotage dans 100% chabasaï. Ensuite, pour l'emmener vers le lettré, il faut couper un peu plus court.
L'idée, c'est d'en retirer un peu d'autres... Mais surtout, avant, de voir comment il va surmonter le rempotage. Je lui laisserais prendre de la vigueur cette année.
Pour les plus observateurs, les baguettes de bambous permettent de caler une motte très facilement. Elles pourriront avec le temps.
Mai 2023, la pousse est là et il pousse fort. Je vais le laisser faire un peu.
L'année prochaine, je commencerais un compactage ainsi que la réduction de l'inversion de conicité en tête... En 2024, juin ou juillet, je l'amène à un stage pour reprendre certaines parties , retirer encore, reprendre la ligature... Et en septembre de la même année, je le sortirais pour sa première petite expo.
La jita de ce lettré est un fond de barrique. L'accompagnement, une concretion façon bonhomme avec sa tasse. . .
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